MAROC- INTERVIEW-WALID REGRAGUI : «
Entrer complètement dans l’histoire »
Par Aurélien CANOT (Footbalkl365)
Hoalid Regragui est fier. Finaliste de
la CAN avec le Maroc, l’Ajaccien vit un rêve depuis deux semaines.
Lui et ses cadets sont en train d’écrire en Tunisie une magnifique
page de l’histoire du football marocain. Si, en plus, il y a la
coupe au bout…

Photo : AFP |
Hoalid Regragui, sans parler de
victoire finale, le Maroc a déjà réussi quelque chose de grand
durant cette CAN. Il n’y a qu’à voir la liesse populaire qui a
suivi votre qualification ?
Exactement.
Mettre quatre buts au Mali en demi-finale de la CAN, c’est du
jamais vu et ce n’est pas donné à tout le monde. Maintenant, ça
a permis au peuple marocain de vivre une soirée inoubliable – le
coach nous a dit que, là-bas, c’était la folie – et ça nous a
permis à nous d’être en confiance avant cette finale qui devrait
être beaucoup plus dure que l’on ne le pense. Jouer devant 60
000 spectateurs en finale de la CAN tous acquis à la cause de la
Tunisie… Nous aurons encore plus de mérite si nous la ramenons. |
A quoi avez-vous pensé au coup de
sifflet final ?
A ma famille, ma
femme et à tout le peuple marocain. Car nous savions que cela
faisait exactement 28 ans que le Maroc n’avait pas fait de finale de
Coupe d’Afrique. Avec mon pote Ouaddou, nous nous sommes dits : « Ca
y est, nous sommes dans l’histoire du foot marocain. » Maintenant,
il y a une nouvelle page à écrire en gagnant la CAN pour vraiment
entrer complètement dans l’histoire.
Vous avez infligé
un sévère 4-0 en demi-finale à une équipe du Mali dont on attendait
beaucoup ?
Oui, 4-0 c’est
un peu beaucoup pour eux, mais, nous, nous avions conscience en nos
qualités. Déjà, avant la CAN, nous en discutions entre nous et nous
savions que nous avions un groupe pour aller loin. Maintenant, il
nous fallait seulement ce petit déclic qui nous permette de nous
libérer et de nous lâcher. C’est ce qui s’est passé lors du premier
match contre le Nigeria.
« Tous ancrés
dans le même moule »
C’est ce match qui
vous a permis de mettre le moteur en marche finalement ?
Oui, depuis,
tout nous réussit, nous fournissons du jeu et prenons du plaisir à
jouer. Même mercredi, alors qu’il s’agissait d’une demi-finale de
Coupe d’Afrique, nous étions tous hyper cool dans le vestiaire,
comme si rien ne pouvait nous arriver. C’est un truc exceptionnel
qui nous arrive, mais c’est mérité vue la qualité du groupe et le
jeu que nous fournissons depuis le début.
On parle beaucoup
des qualités défensives du Maroc. Or, vous passez quatre buts au
Mali. Ce qui fait du Maroc une équipe complète ?
C’est exactement
ça. Nous avons mis treize buts en cinq matchs. Ce qui fait plus de
deux buts de moyenne. Derrière, c’est vrai que nous n’avons pris que
deux buts, mais, en fait, nous sommes tous complémentaires. Il ne
faut pas sortir un nom. On dit que l’axe central de la défense est
fort, c’est indéniable. Maintenant, devant, nous avons un potentiel
offensif qui est énorme. Nous avons Zaïri, Chamakh, Hadji, nous
avons le petit Baha qui est quatrième attaquant, mais qui est aussi
fort que les trois autres.
Ce sont tous de
jeunes attaquants, mais cela ne les empêche pas d’être à la hauteur
?
Nous avions un
peu peur de leur jeunesse, mais, apparemment, à cet âge-là, ils ne
doutent plus, c’est la nouvelle génération, ils sont formatés comme
ça. Ils ne se posent pas de question et savent déjà ce qu’ils
veulent. Après, il ne faut pas non plus oublier le travail des
milieux de terrain, que ce soient Safri, Mokhtari, Kaissi ou moi.
Nous formons tous un travail énorme. C’est un collectif, un peu
comme l’équipe de France en enlevant Zidane. Nous sommes tous ancrés
dans le même moule.
« Notre
équipe peut faire mal à tout le monde »
Ce Maroc-là nous
rappelle celui des années 90. C’était votre sentiment avant que ne
débute cette CAN ?
Là, c’est facile
de dire oui car nous sommes en finale, mais, sincèrement, à tous mes
amis et ma famille, j’avais dit avant la CAN que nous allions faire
quelque chose car, quand vous voyez ces qualités à l’entraînement et
dans les matchs amicaux, vous sentez tout de suite à qui vous avez à
faire. En Ligue 1, je vois de bons joueurs tous les week-ends et je
sais, quand je vais en sélection, ce que valent les joueurs.
Vous ne devez donc
pas être plus surpris que ça du talent affiché par votre équipe ?
Nous savions que nous étions capables de ça, que nous avions une
équipe très forte qui peut faire mal à tout le monde. Imaginez, ils
ont tous pratiquement vingt, vingt-trois ans de moyenne d’âge.
L’avenir est pour eux, nous nous essayons de les encadrer.
El-Karkouri, Ouaddou, Safri et moi sommes les « anciens ». Tout le
reste, ce sont des nouveaux. Mais ce n’est pas difficile de les
encadrer car ils savent déjà ce qu’ils veulent et possèdent un bon
état d’esprit. Tout est facile pour nous.
Vous devez vous
éclater sur un plan personnel ?
Franchement,
quand vous jouez une équipe qui joue le maintien chaque saison, qui
entre dans chaque match de championnat pour ne pas perdre, quand
vous vous retrouvez dans une équipe qui joue au ballon, vous vous
faites plus que plaisir. Pour moi, je m’éclate, c’est un mois de
rêve car ça faisait longtemps que j’avais envie de jouer dans une
équipe pareille. Evoluer dans une équipe qui joue au ballon comme
ça, c’est ce dont rêve tout footballeur.